Développeur : Atlus
Editeur : Nintendo
Plateforme : Nintendo Wii U
Date de sortie : 23 Juin 2016
Code de téléchargement fourni par l’éditeur
Annoncé en 2013 lors d’un Nintendo Direct, le cross-over entre les licences Fire Emblem de Nintendo et Shin Megami Tensei d’Atlus est resté silencieux pendant de très nombreux mois. De base prévu sous le nom de code Shin Megami Tensei X Fire Emblem, le projet renaîtra de ses cendres sous le nom de Tokyo Mirage Session #FE, et ce dans un style auquel beaucoup de joueurs ne s’attendaient pas. Cross-over raté ou mélange de génie ? C’est ce que nous allons voir à travers ce test !
Papa, tu me racontes une (mauvaise) histoire ?

Développé par les équipes d’Atlus, le jeu prend le parti de créer un nouvel univers totalement original plutôt que de piocher dans ce qui a été fait à travers les deux licences. A l’instar d’un Persona, dont le jeu s’inspire énormément, Tokyo Mirage Sessions #FE s’inscrit dans un monde contemporain et toute l’action du jeu prendra place au cœur de la ville de Tokyo. Les événements se déroulent après un drame ayant eu lieu dans un opéra, qui vit tous les acteurs et membres du public soudainement disparaître lors du show. Tout le monde à l’exception de Tsubasa Oribe, petite sœur de l’actrice principale ayant disparue elle aussi lors du tragique événement. Cinq ans plus tard, nous retrouvons Itsuki, personnage principal et ami d’enfance de Tsubasa, qui accompagne cette dernière à un casting d’idol. Pour ceux qui ne sont pas familiers avec la culture japonaise, les idols sont des artistes japonaises hyper médiatisées qui ont tendance à faire valoir leurs niaiseries et leur boobs talents d’actrice, de modèle et de chanteuse pour décrocher des contrats. Parenthèse fermée, nous retrouvons donc nos compères lors du casting où les choses tourneront mal suite à l’attaque de Mirages, sorte d’esprits maléfiques. Tsubasa sera capturée puis entraînée dans l’Idolasphere, un monde parallèle d’où proviennent ces dits Mirages dont le but est de drainer les humains de leur Performa, une énergie enfouie au sein de tout être humain et qui est régit par leur sens de la créativité artistique. Au cours de ses déboires pour sauver Tsubasa, notre héros rencontrera Chrom, personnage très connu des fans de Fire Emblem, qui viendra épauler Itsuki tout au long de son aventure. Après avoir sauvé son amie d’enfance, les deux personnages feront la rencontre de Maiko Shimazaki, directrice de l’agence de divertissement et de production Fortuna Entertainment, qui enquête en secret sur les apparitions de Mirages et sur les événements impliquant ces derniers.
Le scénario de ce cross-over est loin d’être exceptionnel et vous pouvez compter une bonne cinquantaine d’heures, quêtes annexes comprises, pour en venir à bout. La partie un tant soit peu intéressante du scénario ne se révèle que dans le dernier quart du jeu, ce qui laisse les trois autres quarts à errer dans les différents donjons sans grande conviction. La plupart des personnages principaux et secondaires sont assez plats, à quelques exceptions près, et on a plus souvent l’impression de se retrouver face à un mauvais animé japonais basé sur un univers d’idol alors que l’on s’attendait à mieux pour un mélange de Fire Emblem et Shin Megami Tensei, deux licences qui en imposent.
Entre inspiration et nouveautés
Si je vous ai parlé de Persona plus haut, ce n’est pas pour rien car Tokyo Mirage Session #FE s’en inspire tellement que l’on pourrait le qualifier d’ersatz de Persona, bien qu’apportant quand même un certain nombre de changements par rapport à son cousin éloigné. Tout comme dans Persona, on dirige un personnage à travers une carte (de Tokyo dans le cas présent) depuis laquelle on sélectionne les endroits à visiter. Les différents lieux sont très fermés et il n’en existe qu’une poignée, on fait donc très vite le tour de chaque quartier de la ville. Le quartier principal est Shibuya, où vous pourrez vous ravitailler en objets et pièces d’équipements pour arpenter les différents Idolaspheres, c’est-à-dire les donjons et le cœur de ce Tokyo Mirage Sessions #FE. Ces donjons sont tous basés sur un thème particulier et, contrairement à la majorité des JRPGs, il ne vous suffira pas de traverser les donjons d’un bout à l’autre pour en venir à bout.
Les donjons de TMS#FE sont pensés comme des casse-têtes, il faudra donc jouer avec ses méninges pour y progresser. Dans ces dédales, les ennemis sont directement visibles à l’écran. Il est possible d’asséner un coup à ces derniers pour les assommer et lancer le combat en espérant commencer avec une action supplémentaire.
C’est justement au niveau du système de combat du jeu que l’on voit le mélange des deux licences. Tokyo Mirage Sessions #FE est un RPG au tour par tour dans lequel les équipes sont composées de trois héros pendant les combats. Chaque personnage du jeu, héros ou adversaire, est équipé d’une arme blanche et nous permet de retrouver le système de triangle des armes de Fire Emblem. De ce fait, l’épée bat la hache, qui elle-même bat la lance, qui est efficace contre l’épée. Attaquer le point faible d’un ennemi permet d’infliger un coup critique qui double les dégâts infligés en temps normal; il faudra cependant faire très attention lors des affrontements car l’équipe est également sujette à ce fameux triangle des armes. Le côté Shin Megami Tensei se retrouve quant à lui au niveau de tous les sorts du jeu : Agi, Zyo, Din, Bufu, les amateurs de la saga retrouveront très rapidement leurs marques dans ce nouveau titre.

Lors des affrontements, plusieurs commandes sont à disposition : il est possible d’attaquer normalement, de fuir, de garder durant son tour, d’utiliser un objet, de remplacer un personnage avec un autre en réserve sans perdre son tour et d’utiliser les fameux Skills. Les Skills sont l’essence même du gameplay de ce titre, couplé avec les Session Skills. Comme dit plus haut, chaque héros et Mirage possède une faiblesse; il faut également savoir que chaque Skill offensif, qu’il soit physique ou magique, possède une affinité. Si vous attaquez un adversaire vulnérable à l’affinité de votre Skill et qu’un de vos alliés possède le session Skill adéquat, votre allié attaquera automatiquement derrière. De plus, si un autre membre de votre équipe possède un Session Skill en équation avec la dernière attaque, ce membre attaquera lui aussi automatiquement et ainsi de suite jusqu’à ce que la chaîne se termine, à défaut d’une attaque par personnage. C’est le cœur du gameplay de ce Tokyo Mirage, si bien qu’il est référencé dans le titre du jeu. Les attaques portées individuellement n’infligent pas énormément de dégâts mais tirer parti des faiblesses de ses adversaires pour enclencher des sessions est la clé de la victoire. Encore une fois, attention, les jeux Shin Megami Tensei et Fire Emblem sont souvent réputés pour être sévères et, tout comme pour le fameux triangle des armes, les ennemis peuvent également enclencher des sessions sur vos personnages et décimer votre équipe en quelques tours seulement (ceci est une histoire vraie !). Bien qu’étant l’un des atouts de ce jeu et l’élément central du gameplay, on arrive en fin de jeu avec des chaînes conséquentes qui rendent les combats assez longs, obligeant le joueur à attendre parfois plus d’une minute à regarder les différentes animations avant de reprendre les commandes (coucou Chevaliers de la Table Ronde). Pour apporter encore un soupçon de stratégie aux combats, une barre affiche le tour d’attaque des personnages alliés ou ennemis présents sur le champ de bataille, ce qui permet de s’adapter au déroulement du combat pour effectuer les bons choix sans se préoccuper de savoir qui attaquera lors du prochain tour.
Pour sortir de la monotonie inhérente au rythme du jeu, de nombreuses quêtes annexes sont éparpillées un peu partout au sein de la ville de Tokyo, mais sont sans intérêt et à 95% du temps récompensées par des objets inutiles. Il existe cependant d’autres quêtes annexes un peu plus élaborées mettant en scène les différents protagonistes dans des situations assez « what the fuck », qui permettent de creuser leur background ainsi que de renforcer les liens entre eux afin de gagner différentes compétences qui aident grandement lors des combats.
Chaque victoire est récompensée par une certaine somme de yens qu’il est possible de dépenser pour acheter costumes, accessoires ou objets facilitant la progression. En plus de l’argent, le joueur est également récompensé par de l’expérience, qui augmente les statistiques des différents personnages, et de la Performa. Cette dernière vient renforcer le Mirage rattaché à un personnage en le faisant monter de niveau pour gagner de nouveaux Skills offensifs, Skill passifs et Session Skills. Il n’est possible de garder qu’un certain nombre de Skills et il faudra rapidement faire des choix assez difficiles, vu que les personnages peuvent apprendre un panel très large de Skills différents.

Dans Tokyo Mirage Session, chaque héros est accompagné d’un Mirage, qui est en réalité un personnage plus ou moins célèbre de la série Fire Emblem. Lors des affrontements, le héros et le Mirage ne forment plus qu’un pour combattre, le Mirage devenant l’arme (dédicace à Soul Eater). Ainsi, dans le jeu, il est impossible d’acheter des armes. Comment renforcer son personnage, me direz-vous ? Eh bien, en faisant évoluer son Carnage, la forme létale de votre personnage. Après chaque combat, les ennemis laissent des matériaux derrière eux et si vous possédez ceux qu’il faut, il est possible de vous procurer une nouvelle arme chez Tiki, la petite dragonne de Fire Emblem : Awakening. Chaque Carnage Form confère 4 Skills (5 en fin de jeu) que l’on obtient en combattant. C’est dans ce système d’évolution des armes que se trouve l’un des plus gros points noirs du jeu et qui cause d’énormes problèmes de rythme. Il existe des dizaines de formes d’armes différentes accessibles plus ou moins rapidement et il arrive très souvent que l’on débloque des nouvelles Carnages Form en plein milieu d’un donjon. Ceci pousse à effectuer des allers-retours incessants entre les donjons et Tiki pour faire évoluer son Mirage, dans le but de rentabiliser la Performa gagnée en fin de combat vu que l’on vient tout juste d’améliorer au maximum son arme. A la manière de Fire Emblem, les Mirages peuvent également être promus à une nouvelle classe qui améliorera ses statistiques et qui influera sur les Carnage Form disponibles.
Outre ce mauvais point, la progression globale est plutôt agréable. Il ne sera pas nécessaire de passer par de longues phases de leveling pour peu que vous engagiez assez de combats et la difficulté est bien dosée; les boss restant les combats les plus intéressants, nécessitant une bonne dose de stratégie pour en venir à bout.
« T’es moche mais t’as du style ! »
D’un point de vue technique, on peut dire sans trop se mouiller que le jeu ne casse pas trois pattes à un canard. Même sur la Wii U, qui est une console dépassée techniquement face à ses concurrentes, on a déjà vu des jeux bien plus jolis à regarder tourner sur la machine. Les textures sont grossières, l’animation des personnages hors-combat est lamentable, mais le jeu a tout de même le mérite d’avoir un framerate constant, même lors des affrontements où divers effets visuels virevoltent dans tous les sens. Bien que pauvre techniquement, un très grand soin a été apporté aux menus et au HUD qui affichent un certain cachet et un style sympathique. Les divers concerts auxquels nous avons droit lors de différents passages du jeu sont des cinématiques en CG qui reprennent le style de celles de Fire Emblem : Awakening, pour un résultat à mi-chemin entre 3D et animé de toute beauté. Le character design est extrêmement réussi, pour peu que l’on ne soit pas allergique au style animé et aux choix de design des personnages issus de Fire Emblem que l’on retrouve déshumanisés, ce qui est entièrement justifié par l’univers de Tokyo Mirage Sessions #FE. Le jeu transpire une certaine classe dans sa globalité tant toute la partie graphique est homogène, ce qui confère au titre d’Atlus une véritable identité visuelle.
Pour la partie sonore, Atlus a fait appel à la compagnie Avex pour composer les morceaux interprétés par les différents protagonistes qui, on le rappelle, font tous partie d’une agence d’idol. Les fans de J-pop seront aux anges et les autres devront supporter des chansons toutes droit sorties d’animé nyan nyan. Pour le reste des musiques, c’est Yoshiaki Fujisawa qui est aux commandes, un compositeur qui a principalement œuvré pour des animés japonais et qui s’attaque pour la première fois à la composition pour un jeu vidéo. Force est de constater que le résultat est convaincant, la musique est parfaitement adaptée aux environnements, ainsi on retrouve des musiques souvent gaies dans les différents quartiers de Tokyo alors que les donjons ont droit à une musique bien plus oppressante et industrielle pour appuyer le danger omniprésent. Les thèmes des combats que vous entendrez sont convenables et plaisants à écouter dans l’ensemble sans pour autant être inoubliables.
Réfractaires à la Japoniaiserie, ne cliquez pas sur cette vidéo sous risque d’ulcère.
LE RÉCAP’
- Un système de combat sympa
- Durée de vie correcte
- De nombreux costumes alternatifs sans passer par la case DLC
- Une identité visuelle qui a du charme
- Character design vraiment réussi
- Des cinématiques de toute beauté
- La présence du doublage japonais
- Des donjons sympathiques
- Des combats qui s’éternisent
- Les innombrables allers-retours
- Très pauvre d’un point de vue technique
- Il est préférable d’aimer les animés nyan nyan et la J-pop
- Personnages transparents
- Une histoire dénuée d’intérêt
- Textes en anglais uniquement
- La ville de Tokyo et ses murs invisibles
- On s’attendait à mieux pour le clash de ces deux licences

Au vu des deux licences qui se mélangent pour donner lieu à ce Tokyo Mirage Sessions #FE, on aurait pu s’attendre à mieux de la part des développeurs. Le titre n’est clairement pas à la hauteur des attentes et nous offre une aventure tout bonnement modeste, sans plus d’ambitions. À défaut d’avoir d’autres RPG à se mettre sous la dent sur Wii U, mis à part le dantesque Xenoblade Chronicles X qui s’inscrit dans un style différent, ce Tokyo Mirage Sessions #FE reste tout de même un met correct pour les amateurs de jeux de rôles japonais.
Laissez un commentaire